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Nouvelle interview de Cyrille Chahboune

Toujours dans le cadre de notre mécénat, nous suivons et soutenons le lieutenant Cyrille Chahboune dans son projet olympique. Il nous a accordé une nouvelle fois de son précieux temps pour nous accorder une interview, afin de mieux connaître ce champion au mental d'acier.


Après votre accident quelle a été la tâche quotidienne qui s’est révélée être la plus compliquée ?

Je dirais que c’est de marcher (rires). Plus sérieusement, c’est justement le fait de marcher avec des prothèses car cela demande beaucoup d’énergie. Ce ne sont pas des prothèses ultra high tech mais elles ont tout de même de l’électronique embarquée qui me permet de faire des mouvements précis. Par exemple, lors de séances d'entraînement où je lève des poids, la prothèse détecte les mouvements et va, par exemple, bloquer le vérin d’articulation pour me permettre d’avoir l’appui nécessaire pour exécuter le mouvement voulu.

En gros, comme on ne maîtrise plus soi-même le mouvement, car la machine le fait pour nous, il faut réapprendre à marcher justement. Il faut se familiariser avec sa prothèse pour être à même de retrouver des mouvements quasi-naturels.


Quels sont les endroits qui présentent, à ce jour, les plus grandes difficultés d’accès ?

Clairement, ce sont principalement les vieux bâtiments qui ne sont pas très accessibles pour les personnes en situation de handicap physique. Parfois l’architecture du bâtiment en elle-même est bloquante pour accueillir des infrastructures adaptées, mais parfois aussi il y a un réel manque de volonté des propriétaires qui ne veulent pas jouer le jeu de l’inclusion.

En dehors des bâtiments privés, car les publics eux sont soumis désormais à des normes, il faut aussi penser aux infrastructures de mobilité comme le métro. A Paris, par exemple, tout est très mal agencé pour les personnes à mobilité réduite. Une seule ligne est considérée comme accessible. Et encore tous les arrêts ne sont pas équipés pour les personnes handicapées.

En revanche, les tramways et les bus s’adaptent de plus en plus, ainsi que les métros récents comme celui de Toulouse que j’ai eu l’occasion de tester.


Selon vous, quels seraient les moyens à mettre en œuvre pour faciliter ces accès ?

C’est très compliqué de répondre à cette question je vous avoue. Difficile d’allier des infrastructures d’accessibilité sans dénaturer certains bâtiments ou engendrer des coûts parfois très élevés.

Les normes actuelles permettent d’imposer une accessibilité obligatoire dans tout ce qui est neuf, ce qui déjà est devenu un réel plus sachant que les parcs immobiliers se renouvellent régulièrement et que les infrastructures de transport tendent à s’étendre et à se modifier avec les prises de conscience écologiques par exemple.


Pensez-vous qu'il existe un moyen pour mieux sensibiliser les individus sur la mise en place des normes PMR ?

Faire des interventions est déjà un bon moyen de sensibiliser les individus sur cela. Des interventions en entreprise ou en milieu scolaire est le meilleur moyen de capter un public car c’est là que les prises de consciences sont les plus faciles à créer.

Pour ma part, avant mon accident, je n’avais aucun ami handicapé, du coup jamais je n’ai été sensibilisé au handicap et personne ne m’a jamais sensibilisé à cette question. Je vivais ma vie perso et pro sans me poser des questions sur l’accessibilité des autres. Ce n’est qu’une fois confronté à cette situation que je me suis aperçu de la difficulté qu’il y a à faire prendre conscience aux gens de la nécessité pour les PMR qu’on prenne en compte leurs difficultés.

Les moyennes et grandes entreprises doivent notamment être sensibilisées sur la question. Que ce soit avec l’inclusion par l’embauche mais aussi avec les infrastructures à mettre en place. Même si les lois nous aident, on doit aussi faire comprendre aux gens qu’une personne à mobilité réduite peut avoir une réelle valeur ajoutée pour eux. Nous avons d’ailleurs des retours très positifs de la part des cadres, qui sont force de proposition dans leurs entreprises.

Ces interventions, qu’elles soient en milieu scolaire ou au sein d'entreprises, sont essentielles pour que les prises de consciences se fassent et que l’accessibilité se démocratise.


Lors des compétitions avez-vous fait face à une situation discriminante malgré le contexte ?

Non, fort heureusement. Il faut dire que le contexte est adapté, mais malgré tout, on constate parfois que certaines structures manquent cruellement d’accessibilité. Mais on nous aide à accéder aux endroits qui ne sont pas adaptés.

Ce n’est pas discriminant en réalité, les gens organisent quelque chose pour nous mettre en avant, ils nous aident, le souci vient de leurs infrastructures mais comme je le disais, adapter des lieux ne peut pas se faire un claquement de doigts et il faut passer plusieurs étapes avant de déclencher des travaux. Néanmoins, quand un lieu, une ville, une organisation, souhaite accueillir des handis, il y a alors un cahier des charges mis en place et les soucis d’accessibilité permettent parfois justement de créer une sensibilisation qui peut ensuite amener à la création de travaux pour accueillir de nouveaux des compétitions dans un cadre beaucoup mieux adapté.


Avant votre accident vous souciez-vous des infrastructures destinées aux handicapés ?

Comme je le disais précédemment, je n’avais jamais eu de personnes handicapées dans mon entourage, donc je n’étais pas sensibilisé à cela. Quand je suis sorti de l'hôpital, ça a été brutal, ne serait-ce que lorsque je suis allé faire une simple balade, je me suis rendu compte des trottoirs non adaptés, des voitures mal garées…. Quand vous devez parcourir 500m de plus pour simplement accéder au trottoir d’en face, et quand on sait les efforts que c’est de circuler en fauteuil par exemple, on comprend très vite pourquoi il faut que les PMR et leurs infrastructures soient mieux protégées contre des incivilités ou un manque cruel de volonté de la part d’élus de modifier leurs infrastructures.


Etes-vous en relation ou faites-vous partie d’associations qui luttent pour une meilleure inclusion des personnes handicapées ?

Je fais moi même partie d’associations qui aident les militaires blessés, l’inclusion se passe par le sport.

Je peux citer notamment l’association des gueules cassées, une association très ancienne créée après la première guerre mondiale. C’est d’ailleurs cette association qui a lancé la fameuse Française des Jeux, qui organisait à l’époque une tombola nationale dont les fonds permettaient à l’association de fournir des prothèses aux blessés de guerre.

Aujourd’hui, la Française des Jeux a bien grandi mais l’association a toujours des parts.


Quels coûts supplémentaires engendrent votre mobilité par rapport à une personne valide ? Est-ce que malgré les aides mises en place pour les personnes à mobilité réduite, vous avez tout de même des frais spécifiques lors de vos déplacements ?

Malheureusement oui, il faut savoir d’abord que moi, en tant qu’ancien militaire, et donc vétéran, les aides dont je dispose sont différentes des civils. Nous avons de meilleurs remboursements et aussi de nombreuses associations qui nous aident à financer. Mais si on part du point de vue d’un civil handicapé c’est toute autre chose.

Un fauteuil roulant est remboursé entre 500 et 800€ par la sécurité sociale par exemple. Prenez un fauteuil comme le mien, il n’y a absolument rien de fou dessus. Eh bien il coûte déjà 6 000€ ! Je vous laisse imaginer si j’avais la moindre électronique embarquée dessus.

Si vous voulez faire du ski, comptez près de 8 000€ pour un fauteuil adapté, qui ne sera bien entendu pas remboursé, idem pour le vélo, comptez près de 6 000€. Et certaines prothèses sont carrément hors de portée si vous n’avez aucune aide pour vous les procurer. Mes prothèses coûtent par exemple 120 000€ chacune, et même si j’en suis satisfait et que je les trouve très bien, ce ne sont pas les dernières technologies qui elles, coûtent encore plus cher !

Bien sûr, les associations aident beaucoup, mais les personnes handicapées qui souhaitent pratiquer certains sports font face à un autre handicap : le coût !

Donc oui, malheureusement, la mobilité réduite engendre des coûts supplémentaires selon ce que vous souhaitez faire. Après, fort heureusement, les personnes handicapés disposent de réductions dans les transports et n’ont aucun frais supplémentaire pour faire transporter leur matériel médical.


Est-ce que grâce à vos activités sur les réseaux sociaux et à la médiatisation dont vous faites preuve, cela a encouragé d’autres personnes à faire comme vous ?

Je dirais que c’est surtout grâce à ce que fais sur le plan sportif. C’est à travers le prisme du sport que j’ai su et pu motiver du monde à faire comme moi et à tenter de se dépasser. Mais ce sont surtout des camarades militaires.

Pour ce qui est des civils, j’ai eu aussi de bons retours, qu’ils soient directs ou indirects.


En quoi consiste votre entraînement quotidien ?

Actuellement il varie en fonction de mes RDV car j’avoue que je bouge énormément en ce moment. Mais en gros quasi quotidiennement, le matin, je fais 2h de renforcement musculaire.

L’après midi dépend vraiment de mon planning mais le soir je fais 2h de volley quasi quotidiennement (sauf si je suis en déplacement).

Je fais ensuite régulièrement de la soufflerie et du tir, cela dépend encore une fois de mes disponibilités, mais j’ai malgré tout une forte régularité sur mes entraînements afin de me tenir prêt pour les compétitions.


Que pensez-vous de votre partenariat avec des entreprises comme ContainerZ, qui mettent en œuvre des aménagements et accessoires pour répondre aux problématiques d’accès aux modules qu’ils ont élaboré ?

On voit que des entreprises comme la vôtre ont un réel esprit d’initiative et ne voient pas que le business comme seul moteur. C’est vrai que le panel de gens touchés par le handicap est moindre par rapport aux valides, mais le fait que des outils existent et soient élaborés pour aider à ce que les PMR bénéficient d’une meilleure inclusivité est un réel plus.

Quand je vois des entreprises jouer le jeu comme vous le faites, cela prouve que les mentalités changent et qu’il y a une réelle réponse à des problématiques qui ne bénéficiaient pas ou peu de solutions au préalable.


Merci Cyrille pour votre temps consacré à nous éclairer sur le thème du handicap et tous nos encouragements pour les prochaines compétitions en attendant les JO !

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