Le grand retour du blank sailing
Qu’est-ce que le « blank sailing », terme qui réapparaît régulièrement dans la presse spécialisée et particulièrement depuis le début de la crise sanitaire mondiale ? Hantise des chargeurs, le blank sailing consiste, pour un armateur, à annuler une ou plusieurs escales, voire à annuler un trajet entier.
Blank sailings en masse
Le blank sailing n’est pas une nouveauté. Il arrive assez régulièrement que, pour des raisons diverses, des escales soient annulées. Mais en règle générale, dans un contexte logistique « normal », il est assez rare que les compagnies maritimes recourent aux blank sailings. Souvent, les armateurs annulent une escale dans un port si celui-ci est, par exemple, sujet d’une congestion exceptionnelle : avarie technique au sol, grèves, conditions météorologiques, etc. Parfois une annulation peut être aussi due à un retard du navire, que celui-ci tentera de rattraper en évitant un port et en re-routant la marchandise prévue pour le port omis sur un autre bateau ou par voie terrestre. Mais on assiste rarement à une série d’annulations au niveau mondial comme c’est le cas en ce moment.
La crise sanitaire de 2020 a contraint les armateurs à multiplier les blank sailings, certaines zones étant devenues inaccessibles, occasionnant de très nombreux remous dans la logistique mondiale. Parcs et terminaux saturés, navires bloqués pendant plusieurs semaines, pénuries de conteneurs maritimes à l’autre bout, c’est un véritable chaos logistique qui a entraîné les armateurs à décider d’annulations dans des proportions encore inédites.
L’accalmie logistique n’aura été que de courte durée. Le conflit militaire en Europe entre la Russie et l’Ukraine a bloqué certains frets, créant des hausses de taux de matières et d’énergie stratosphériques et qui ont poussé de nombreux secteurs d’activité à hiberner en attendant des jours meilleurs. En sus de cette surprise géopolitique, s’est ajouté le retour du COVID-19 en Chine, laquelle a décidé de mener une politique zéro Covid ultra autoritaire en confinant sa population et en fermant des zones entières comme Shanghai.
Cette mise sous cloche de la Chine a poussé les armateurs à annuler un très grand nombre d’escales sur ce secteur, pourtant très sollicité. On recense ainsi une baisse qui oscille entre 30 et 40% des frets au départ d’Asie, occasionnant en parallèle une baisse des tarifs dans un sens… et une augmentation dans l’autre.
Il est à craindre que lorsque l’activité export repartira en Chine, très probablement de manière très forte, elle entraînera une congestion dans les ports d’importation, en Europe et aux Etats-Unis, les infrastructures portuaires et logistiques étant déjà à saturation dans ces lieux. Il faut rappeler que les porte-conteneurs géants dont l’utilisation a explosé au cours des dernières décennies ne peuvent être opérés que dans un nombre restreint de ports. En cas de congestion de ces ports, le nombre de ports secondaires où évacuer la marchandise est restreint voire nul, et il ne reste que l’attente d’un créneau, parfois long, pour que le navire puisse être opéré.
De nombreux acteurs du transport ont commencé à se préparer à cette vague de containers qui toucheront les ports dans quelques semaines. Un effort d’anticipation louable mais qui n’est pas garant d’efficacité tant la conjoncture sait se montrer imprévisible. Et le timing pour disposer des moyens de réponse nécessaires est encore une autre contrainte !
Comme toujours, nous ne manquerons pas de surveiller la situation de près pour vous tenir au courant des évolutions du secteur.