L’année écoulée aura été la troisième meilleure année jamais réalisée pour les compagnies maritimes alors que les oracles avaient annoncé une des pires années de l’histoire du container.

La recette ? Les crises géopolitiques.

L'influence de la géopolitique mondiale a atteint un tel niveau qu’elle pèse davantage sur l’économie que n’importe quelle décision politique ou commerciale.

Ainsi, l’industrie du transport containerisé pourrait enregistrer sa troisième meilleure année alors que l’équilibre entre l’offre et la demande était totalement défavorable début 2024. La flotte mondiale de conteneurs a augmenté de plus de 10% au cours des douze derniers mois. Ce sont près de 3 millions d’EVP qui ont été ajoutés à la flotte. Et près de 60 % de ces containers ajoutés ont été absorbés par le trafic Asie-Europe. Le détournement de la flotte mondiale de porte-conteneurs par le cap de Bonne Espérance au détriment du canal de Suez a permis d’absorber de la capacité de transport pile au moment où les livraisons records de nouveaux navires arrivaient sur le marché. Sans cette demande artificielle, la surcapacité de transport aurait été le fléau attendu de l'année 2024.

L’allongement du temps de mer aura aspiré une telle offre de transport que l'industrie a terminé l'année avec quasiment toute la flotte en service, tirant les taux de fret à la hausse avec un rebond de plus de 40% par rapport à 2023.

Des taux de fret s’envolent…

Les hausses soudaines des taux de fret, en particulier au second semestre, sont dues à plusieurs augmentations générales des taux et, pour ce qui est des trafics transpacifiques, aux effets de spéculation engendrés par les annonces tonitruantes de Donald Trump d’augmentations prochaines des droits de douane à l’entrée du territoire américain. Le tout dans le climat de fièvre acheteuse qui précède traditionnellement les fêtes de fin d’année et le Nouvel An chinois (29 janvier cette année) et la fermeture des usines qui l’accompagne. Paradoxalement, le trade Asie-Méditerranée est le seul où les taux de fret sont à la baisse.

…les facteurs de risque demeurent

Les facteurs susceptibles d’entamer la rentabilité du transport maritime mondial restent cependant nombreux. Parmi les risques qui vont peser durant les prochaines années demeure l'offre excédentaire de navires et son ajustement à un marché mondial devenu très volatil par un environnement géopolitique fragile et fluctuant. Les commandes de capacités de transport ont battu tous les records ces deux dernières années et leurs livraisons vont s’étaler jusqu’à 2029 avec un pic en 2027.

Au niveau des tensions politiques, le problème Houthis, finalement très favorable à la rentabilité des opérateurs maritimes, n’est qu’une partie visible de problématiques plus larges sur la sécurité dans le transport maritime international.

En parallèle, les politiques commerciales vont très probablement se complexifier sous la présidence de Donald Trump. L’ambiance des discussions entre Washington et Pékin est appelée à se tendre. Et même si le nouveau président élu a revu à la baisse ses intentions quant aux droits de douane qu’il comptait appliquer à son partenaire chinois, la rhétorique est inquiétante et le potentiel d'une guerre commerciale réel.

Dans le même temps, les experts de la Cnuced envisagent une augmentation du commerce maritime de plus de 2% sur les 4 prochaines années avec une croissance de près de 3% du commerce containerisé.